2 Décembre 2023 – JION, JI’IN, JITTE: Des liaisons dans et entre les KATA

Dans cet article, j’ai envie de développer sur les remarques et consignes que j’ai reçues, et ce qu’elles m’ont inspiré.

En ouverture, Benoit et Roger nous font un petit rappel à propos de “la trilogie JION, JI’IN, JITTE”
C’était très rapide, je me permettrais donc d’apporter plus de détails pour ceux qui en auraient l’intérêt en fin de cet article

Après cette introduction “théorique” et “symbolique”, il est temps de se mettre à bosser!

Benoit DEFIVES, 6ème DAN – travailler les bases de l’enchainement phare du KATA

Le travail en répétition sur trois KIBA DACHI se retrouve dans les 3 KATA
Si on souhaite simplifier le propos

pour JION, cette séquence se fait avec TEISHO UCHI,
Pour JI’IN c’est avec SHUTO UCHI (avec la main en forme TEISHO)
Pour JITTE, c’est avec TETSUI UCHI (avec le bras en forme SOTO UKE)

BenoÎt nous propose un travail d’étude en KIHON sur chacune des trois formes, en utilisant en plus un MAEGERI pour le KIHON issu de JITTE, qui nous oblige à nous concentrer sur la liaison au sol, avec nos appuis sur le talon (bien entendu!!!) et nous forcer à utiliser la bascule des hanches pour retrouver le KIBA DACHI

Le KIBA DACHI est utilisé pour prendre l’avantage face à l’attaquant, et rester “solide” (stabilité, ancrage, puissance développée, avec une sensation très différente de la force brute) tout en cherchant à développer le travail d’ATEMI dans un temps très bref pour prendre la maîtrise de la situation. Pour ceux qui étaient là, le fameux “Pam-Pam” 😀
L’importance de la liaison ici est faite dans le timing d’exécution de l’enchaînement.
plus le temps est court, plus la séquence est efficace.

Avec ce genre de travail, tout le monde trouve son compte. Débutants comme confirmés.

Ainsi, l’approche KIHON, KATA, KUMITE (en liaison) prend un rôle également dans ce système
Le KIHON sert à se contraindre pour corriger le naturel,
Le KATA sert à développer et renforcer les corrections apportées
Le KUMITE fait en sorte que le travail développé redevient naturel, libéré, presque facile: de l’extérieur on ne voit presque plus ce qui a été accompli dans les deux premières étapes et pourtant… On compte en dizaines d’heures dépensées pour en arriver la. C’est un des points clés du KARATE DO.

Roger MENANT, 7ème DAN – KIHON /KATA /KUMITE un travail unifié, des sensations libérées

Roger enchaîne sur un travail qui part du KATA, pour mieux s’en éloigner,
on commence par utiliser une séquence du milieu de JITTE

  • JODAN SHUTO UKE
  • MOROTE JO UKE
  • MOROTE KOKO DORI
  • MOROTE JO DORI
  • SAGI ASHI DACHI

C’est un BUNKAI qu’il nous est donné de découvrir, et on pourrait s’arrêter à ce travail, mais comme d’habitude, le BUNKAI que Roger propose n’est qu’une illustration destinée à nous orienter sur le besoin de développer sa disponibilité pour réagir. Le travail de liaison issu du KATA consiste à rester fidèle à la structure, cette séquence porte en elle plusieurs réponses à des situations différentes.
Et pour bien construire cette réponse, il faut se concentrer sur le MAAI (les réponses sont dans les KATA, et notamment lorsqu’il faut avancer dans l’attaque)
et sur les armes naturelles du corps (ATEMI ou saisies pour casser la structure corporelle de l’adversaire)

Roger nous amène également à remarquer que doucement, on peut glisser de notre trilogie de KATA du jour, vers d’autres comme les TEKKI par exemple…

Encore une fois, les liaisons apparaissent entre tous nos outils…
Et pour jouer un peu, on teste des sensations telles que le même travail avec un seul bras, en fermant un œil, etc…
Quand c’est fait honnêtement, on comprend qu’il y a encore un autre niveau à explorer… Même si nous déjà, nous n’avons plus le temps de développer.

En conclusion

Que ce soit avec Benoît ou avec Roger, on a amorcé un travail sur trois KATA,
Que ce soit avec Benoit ou avec Roger, on a dévié sur un travail KUMITE, en passant par le KIHON.
Ce développement à partir des KATA dont nous avons besoin de maîtriser l’EMBUSEN, pour l’exécuter sans y réfléchir et nous concentrer sur d’autres points, amène toujours un travail extrêmement riche, sans fin;


un travail KARATE DO.
 Merci Benoît, Merci Roger
et merci à tous mes partenaires du jour…

Et mon petit retour sur notre fameuse “trilogie de la boxe chinoise”

Histoire et influences
c’est une chose très connue (au moins à partir du SHODAN!)

JION, JI’IN et JITTE sont issus d’une boxe chinoise

Les trois KATA commencent par le même salut “MING”
Ce mouvement simple, plus important qu’il n’y paraît,  est appelé en chinois BAO QUAN LI (littéralement « le rite de l’enveloppement de la main ») ou parfois BAO QUAN (« la main enveloppée »).
Il y a des informations “mystérieuses” cachées derrière cette “salutation”

A l’entrainement, au dojo,

Le geste, comme dans la vie de tous les jours, est avant tout une marque de respect.
Respect du professeur et de l’enseignement que l’on va recevoir, respect des autres, respect de soi-même.


Pour approfondir le rituel du salut, et son importance dans les arts martiaux et le KARATE en particulier, j’aimerais vous renvoyer à un article rédigé précédemment

http://www.karateneuvilleenferrain.org/NEW_CMS/2020/01/09/reigi-saho-ou-une-facon-de-montrer-son-etat-esprit-karate/

Interprétations
Une première interprétation symbolique vient du geste en lui même : une main arrête un poing.
On peut directement faire le rapprochement avec BUDO et particulièrement aux idéogrammes qui dessinent “BU” « arrêter la lance »
Mais attention, cette interprétation s’appelle la théorie « HOKODOME », et la recherche actuelle porte un consensus pour dire que ce n’est probablement pas le sens original de l’emploi des KANJI,
cette interprétation “HOKODOME” provient d’une lecture assez moderne qui pourrait être fortement biaisée par la morale contemporaine.
Le sens le plus logique, si l’on s’arrête au contexte historique de la création des KANJI, sera plutôt “marcher avec la lance”
ça prend une connotation beaucoup moins pacifique que celle que nous lui donnons aujourd’hui “un vrai pratiquant n’engagera pas le combat avant d’avoir épuisé tous les moyens de calmer la situation”
(sur ce point précis, je ne choisis pas, je note juste qu’il y a un intérêt fort de la recherche académique japonaise sur le sujet)

Une deuxième interprétation, encore plus symbolique et issue du taoïsme fait référence au principe du YIN et du YANG.
La main ouverture est YN, négatif, elle représente, entre autres, la part d’ombre, la lune, la terre, ce qui est caché…
Le poing fermé est YANG, positif elle représente la lumière, le soleil, le ciel, mais également ici le cœur.
L’union de la main est du poing est donc la réunion des dualités : YIN/YANG (IN/YO en japonais), positif/négatif, ombre/lumière, terre/ciel…
Ce geste devient l’expression de l’harmonie et de l’équilibre.

Un peu d’histoire
A l’époque de la dynastie Qing, en Chine, les Ming formèrent une rébellion pour récupérer le pouvoir.
Leur signe de ralliement était alors cette même association main ouverte / poing fermé.
Ce salut permettait alors de montrer rapidement son appartenance à un même groupe, et ainsi aux rebelles de se reconnaître entre eux, mais le gste choisi est en lui même intéressant.
La combinaison des caractères « Soleil » et « Lune » donne le caractère « Clarté », qui se prononce en chinois… “Ming”.
Ainsi, en un seul geste, les rebelles affirmaient leur détermination “Renversons les Qing, restaurons les Ming !” et leurs convictions profondes que leur combat sera pour l’harmonie et l’équilibre des peuples. tout un programme…

JION, JI’IN et JITTE démarrent avec la salutation Ming, c’est un message fort pour ces 3 KATA du SHOTOKAN.
Ils partagent également de nombreuses techniques similaires, à tel point que JI’IN est parfois vu comme un “JION bis”, moins intéressant,
France JKA nous rappelle d’ailleurs qu’il n’est plus étudié dans les DOJO JKA, il faut reconnaître que JI’IN a un statut particulier, rien que par le fait que GICHIN FUNAOSHI ait tenté de le renommer SHOKYO, ça n’a pas marché, nous ne saurons pas pourquoi…

Par extrapolation, ce message nous rappelle que ces KATA sont liés, et le message de Roger et Benoît, ira plus loin en nous rappelant “pourquoi s’arrêter là? Si on travaille correctement nos katas, ils sont tous liés!”

REIGI SAHO ou une façon de montrer son état esprit “KARATE”

Le Karate Do est une discipline riche, très riche, avec des rituels, de la philosophie plus ou moins claire, plus ou moins bien transmise.

Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de littérature qui essaie d’expliquer tout un tas de choses pour aider à comprendre, et à progresser.

Parmi tout ce qui existe, nous avons la chance de disposer de deux textes symboliques, synthétiques, courts mais nécessaires et qui sont le point de départ pour organiser sa réflexion et trouver des nouvelles voies à explorer.

je veux parler du Dojo kun et du Niju kun

le premier est un élément culturel très fort du dojo, et sa rédaction ne peut pas, aujourd’hui, être attribuée de manière certaine à O Sensei Funakoshi Gichin.

En revanche, le Niju kun est une création du fondateur du Shotokan.

Commençons par le commencement, je voudrais réfléchir au sens de la première règle du Niju kun.

“le Karaté commence par le respect et finit par le respect” 

(selon une traduction communément admise)

Non!

Ce n’est pas juste une règle édictée pour nous rappeler à la politesse la plus stricte et à la soumission aveugle.

Ou encore nous “différencier” d’un sport de combat et nous dire que nous sommes meilleurs que les autres parce que nous pratiquons un “art martial” 

A mes yeux; c’est beaucoup plus que cela.

C’est un vrai principe directeur et un moyen mnémotechnique simple qui nous rappelle comment entrer dans le bon état d’esprit pour pratiquer le plus correctement possible le KARATE DO traditionnel ( proposé par les okinawaiens d’abord et les japonais ensuite!)

C’est un résumé parfait de l’un des concepts du budo : REIGI-SAHO = respecter l’étiquette

Un principe qui s’applique dans un seul mouvement 

Rei, le salut.

Facile, tout juste deux façons de procéder, 

  • Debout en Musubi Dachi, le RITSUREI
  • Assis en Seiza, un peu plus protocolaire, le ZAREI

Les deux portent exactement les mêmes sens.

Par cette simple phrase, “le Karaté commence par le respect et finit par le respect”  

O Sensei Funakoshi nous a laissé une indication précieuse et la responsabilité de transmettre de ce que ça veut dire dans toutes les situations, au Dojo, dans l’apprentissage du Karate do.

L’idée générale du REIGI SAHO est de se rapprocher le plus possible de l’état d’esprit nécessaire à la compréhension profonde du BUDO

En quelle occasion ?Ce que devrait penser le pratiquant qui salue!
Le salut cérémonial, généralement, dans le cas de remises de diplômes, de grades ou lors d’un événement ou l’on met en avant un pratiquant, pour quelque raison que ce soitJe remercie mon interlocuteur pour sa bienveillance à mon égard, pour m’avoir honoré d’une marque de respect.
Le salut à l’entrée du DOJOJ’accepte les règles de l’école, et je m’engage à m’y conformer strictement.
Avant le cours, quand je suis en tenue dans le dojo, au salut entre pratiquants

je suis kohai – je salue mon ainé dans la pratique en premier, je lui demande implicitement de m’observer pendant le cours, de manière bienveillante pour me signaler des points d’amélioration ou corriger mon attitude 
je suis sempai – je rends le salut à mon condisciple,je m’engage à lui porter un regard bienveillant pendant le cours afin de lui signaler des points d’amélioration, selon mes compétences, en toute humilité.
A la montée sur le tatamije demande humblement l’autorisation de me joindre au cours.
Si le cours a commencé, je me mets en SEIZA au bord du tatami, et j’attends l’autorisation du Sensei en charge du cours ou de l’école
Si le cours n’a pas commencé,
si je suis élève de l’école, je peux démarrer mon échauffement
si je ne suis pas élève de l’école, j’attends sur le bord du tatami d’être accueilli par un sempai ou le sensei.
Le triple salut au début du cours
Au salut Shomen Ni Rei – je pense aux messages de ceux qui ont ouvert la voie, les anciens pratiquants disparus.

Au salut Sensei Ni Rei – j’accepte la route montrée par le professeur en charge du cours

Au salut Otaga Ni Rei – j’accepte de me donner avec honnêteté, et engagement dans ma pratique pour les autres
Pendant le cours, au début d’un exercice
Au Kihon
je montre ma compréhension et ma volonté de m’impliquer dans l’exercice

Au Kumite
Si j’ai le rôle de Uke– je montre à mon partenaire que j’accepte de m’engager à le faire progresser
si j’ai le rôle de Tori- je remercie mon partenaire pour son intention de m’aider dans ma progression

Au Kata
Le kata est un aide mémoire, c’est à dire que TOUS les principes du karaté sont présents dans un kata.
A ce titre, le salut fait partie intégrante du KATA, par ce fait , on a un outil qui nous rappelle à quoi sert véritablement le salut dans la pratique
Au début du Kata je rassemble mes capacités mentales et mes ressources pour entrer dans l’état d’esprit nécessaire, à savoir l’esprit du combat réel

Face à du matériel
je m’engage à respecter le matériel et à l’utiliser dans le respect des consignes qui m’ont été données et/ou uniquement ce pour quoi il a été conçu.
Pendant le cours, à la fin d’un exerciceAprès le Kihon
je reviens dans un état d’esprit neutre, je vide mon esprit pour me rendre disponible pour la suite

Après le Kumite
si j’ai le rôle de Uke– Je remercie mon adversaire d’avoir travaillé dans le respect de mon intégrité physique
si j’ai le rôle de Tori– je remercie mon partenaire pour s’être mis à ma disposition en toute confiance.

Après le Kata
Je réfléchis, j’analyse mon exécution et j’enregistre les points d’amélioration à travailler.

Après l’utilisation de matériel
Je rends le matériel disponible pour quelqu’un d’autre, et j’assure que je l’ai utilisé selon les consignes et/ou selon ce pour quoi il a été conçu.
Le triple salut à la fin du coursAu salut Shomen Ni Rei –
je remercie les anciens pratiquants disparus d’avoir préparé un chemin, je leur montre mon respect, cela correspond à notre “minute de silence”.

Au salut Sensei Ni Rei – Je remercie le professeur en charge de m’avoir fait travaillé aujourd’hui et d’avoir préparé le cours et les exercices dans une logique de progression continue

Au salut Otaga Ni Rei – Je remercie le groupe d’avoir pratiqué et partagé avec moi pour la progression du groupe et ma progression personnelle
A la sortie du tatami
Je demande l’autorisation de sortir du déroulement du cours (à ce titre, j’attends que le sensei ou un sempai donne son accord)
Je quitte la zone de pratique, je reviens progressivement dans mon quotidien.
A la sortie du dojo
Je remercie l’école et ses responsables d’avoir mis à ma disposition un endroit dédié à l’étude, et de m’avoir accueilli pour m’aider à parcourir le chemin et progresser

Dans tous les cas, un salut entre personnes, est toujours rendu!

Aucune exception.

Après avoir réfléchi à tout ça, il faut bien comprendre que l’état d’esprit à cultiver au travers ces “règles de politesse” comprend 5 états (dont il nous faudra également parler dans le détail)

  • SHOSHIN (l’esprit du débutant), 
  • FUDOSHIN (l’esprit immuable), 
  • ZANSHIN (l’esprit persistant), 
  • MUSHIN (l’esprit vide),
  • SENSHIN (l’esprit éveillé/purifié)

mais ça, ce sera peut etre pour plus tard…

Ainsi le “REI” est la meilleure façon d’éviter de perdre du temps à expliquer l’attitude nécessaire pour progresser au Dojo, on a déjà tellement de choses à faire et si peu de temps…

Appliquons le Rei en pensant à ces quelques règles, c’est avant tout pour progresser!

Et le plus beau, c’est que ce qui se pratique au Dojo est également utile dans la vie de tous les jours 

😉

Qu’en pensez vous? Parlons-en!

Jerome

Point culture martiale numéro 1: le grade DAN

Un peu d’histoire…

Dans l’histoire des arts martiaux modernes, au Japon, l’utilisation du terme “DAN” a commencé avec le judo. Les autres disciplines ont suivi graduellement ce modèle pour désigner les grades obtenus au cours de la progression des pratiquants.

Auparavant, au 19ème siècle ce terme avait déjà été utilisé d’une façon peu systématique en Ken Jutsu (technique du sabre).

Le terme DAN n’est pas seulement réservé au domaine des arts martiaux. L’utilisation de ce terme pour désigner des grades est plus ancienne dans différentes activités culturelles japonaises.

Dans le jeu de go, par exemple, le terme DAN est utilisé depuis le 18ème siècle. De nos jours au Japon, le système des grades avec le terme DAN est appliqué aussi à la voie de calligraphie, au jeu d’échec et aussi à l’art des bouliers, qui est la base classique des mathématiques.

Originellement le système de grades s’inscrivait dans l’approfondissement d’un art qui se confondait avec la vie d’une personne. Il constituait en quelque sorte un repère dans l’itinéraire de la vie. Lorsque la notion moderne du Budo est apparue, un peu avant le 20ème siècle, avec la fondation du Judo, c’est dans cet esprit que le système DAN a été adopté.

Il n’y a pas de lien entre la notion de DAN et la compétition ; en combat, la classification de champion importe, en BUDO ce qui importe est la formation d’une personne tout au long de sa progression dont le chemin sur la voie est échelonné par les DAN. Suite à l’expansion mondiale de la pratique des arts martiaux, son usage est maintenant devenu international.

Des responsabilités…

Celui qui s’est appliqué et a persévéré dans l’étude du karaté pour mériter la ceinture noire se distingue des autres étudiants. Être ceinture noire signifie que l’on est parvenu au premier stade de la philosophie du BUDO, et que nous sommes désormais qualifiés pour étudier la subtilité des techniques et méditer le sens profond du karaté.

La ceinture noire ne confère pas seulement un honneur, mais aussi d’importantes responsabilités. Le prestige traditionnel attaché à la ceinture noire, se reporte aussi sur son possesseur. C’est pourquoi le pratiquant doit se montrer digne de cette réputation.

De ce fait, chaque ceinture noire est un ambassadeur du Karaté qu’il représente même à son insu. Il doit donc présenter l’image véritable du karaté, car se conduire dans le dojo ou au dehors de façon contraire aux règles traditionnelles d’honneur et de morale du KARATE DO est préjudiciable, non seulement au possesseur de la ceinture noire, mais aux autres ceintures noires, au dojo qu’il représente, et au karaté tout entier.

Il convient pourtant de se rappeler que s’il existe plusieurs niveaux de DAN, c’est aussi pour marquer le fait que nul n’est parfait et que chacun doit constamment se remettre en cause. Ce n’est pas parce qu’on a obtenu la ceinture noire qu’on devient parfait en tout point.

D’ailleurs, très peu de personnes ont obtenu à la fois le grade de 10ème DAN et la distinction de Meijin (Grand homme accompli). Le Meijin au Japon, est la personne qui est définitivement l’exemple à suivre.

 

Quelques conseils de Taiji Kase

L’important est de progresser, chacun à son rythme, par rapport à soi et non par rapport aux autres. Nous savons que rien n’est acquis définitivement et qu’il convient de ne jamais perdre ni humilité ni patience.

5 ans de pratique, ou plus, permettent d’obtenir la ceinture noire de Karate Do. Mais ce niveau ne fixe que la mémorisation des techniques de base. Bien souvent au Japon, trois ans sont suffisants pour obtenir ce grade, mais l’entraînement journalier est de 2 à 3 heures. La ceinture noire 1er Dan est considéré égale à l’obtention du baccalauréat universitaire qui ouvre la porte aux études supérieures.

10 ans d’études du karaté : Elles vous permettront d’avoir de bonnes bases techniques générales. C’est seulement après ce niveau que l’on devrait commencer à enseigner quotidiennement, car il est très important que le professeur montre correctement les techniques de bases assimilées au cours de ces dix années. Il est indiscutable que l’on ne peut montrer correctement et d’une façon rigoureuse si l’on n’a pas le niveau requis.

15 ans d’entraînement : Outre un corps parfaitement formé et une bonne condition physique, ces 15 années permettront une application automatique de la technique, non pas de façon mécanique mais en permettant de développer l’esprit. Le réflexe blocage/contre-attaque doit être instinctif.

20 ans de pratique : La compréhension reste le trait dominant. Le travail mental arrive au même temps que la réalisation du physique. Ainsi doté de ce mental, le karatéka à ce niveau reste toujours en éveil, comme l’animal endormi que le moindre danger alerte. A partir de là, la vie est consacrée au Karaté Do, on ne peut plus changer de voie ou de destin.

30 ans de Karaté Do : Après cette évolution, l’action est la suivante : dans l’instant de la décision le corps arrive en exprimant la pensée (harmonie mental – physique). Est-il nécessaire de préciser ce que ces 30 années impliquent ? Entraînement régulier, kata, kihon, kumité. La comptabilité des années est étrangère à ce qui précède.

vers 40 années : C’est le niveau vers le sixième sens, une forme de télépathie sensitive de quatrième dimension pour le karatéka ayant atteint ce temps de pratique. On ne peut considérer que seule la réflexion permettra de progresser. La pratique et la réflexion sont toujours indissociables. L’enseignement à retenir de cette progression est que, au début du karaté Do, l’aspect auto défense domine. La notion d’adversité est primitive. Cette progression démontre qu’il ne faut pas combattre, mais aider l’autre et découvrir la voie. Il y a une transformation de la personnalité par la compréhension du partenaire, de l’adversaire.

 

Le magazine officiel de la fédération française de Karaté s’est penché sur le sujet

D’où viennent les grades ? C’est Jigoro Kano, créateur du judo, mais surtout grand esprit qui a voulu rassembler les arts martiaux, et au-delà tous les arts, les « voies » de son pays. C’était un homme moderne qui comprenait le sens de l’évolution de son époque et l’accompagnait. Il fut le premier président du Comité Olympique du Japon et son pays lui doit les Jeux de 1964, des années après sa mort. Lui-même était, un peu comme nous, à cheval entre le sport et la culture traditionnelle dont il avait compris la valeur. Il n’a jamais cessé d’ouvrir et d’avancer, mais sans renoncer à l’essentiel de la culture et des connaissances du passé. Nous lui devons notre tenue et nos grades.

Que symbolisaient-ils dans son esprit ? Le sens particulier de la pratique martiale, qu’il a clarifié toute sa vie. C’est lui qui a utilisé et popularisé le mot « do », qui exprime qu’une pratique qui devient une « voie » vise un double objectif, inséparable et interagissant l’un avec l’autre : le développement technique et celui de l’esprit. Ce que les Japonais désignent aussi par l’expression « Ki Ken Tai Ichi », « l’esprit, la technique — au sens de l’arme — et le corps ensemble ». Avec notre héritage chrétien, nous voyons les choses dans la dualité, le corps d’un côté, la tête de l’autre… Nous faisons des cases là où les Orientaux voient une unité. L’idéogramme japonais est une image claire que nous ne savons pas lire. Il y a tout dedans. « Do » montre un chemin à parcourir, un monde à explorer pour arriver à la compétence et à la maîtrise de l’esprit qui va avec. Jigoro Kano a souhaité que les grades symbolisent les étapes de ce voyage, toujours dans un souci de clarté et de pérennité. Avec nos différences culturelles, ces indications nous sont sans doute encore plus utiles qu’à ses contemporains japonais. On a vite tendance à l’oubli de notre spécificité. Le sport, la performance, la technique spectaculaire sont faciles à voir. L’esprit est invisible.

Que disent nos grades de la discipline ? Ils manifestent la prédominance de l’esprit. C’est la spécificité des arts martiaux. Il y a sans doute à peu près la même dynamique dans la pratique des boxes par exemple, les mêmes bienfaits à en retirer, mais ce n’est pas exprimé dans la culture de ce sport. Dans notre discipline, le but est clair et il serait bon que les pratiquants ne perdent jamais de vue cet aspect des choses. Notre pratique quotidienne est le véhicule de cet objectif double, technique, mais aussi mental. Sous tous ses aspects : La compétition est un test physique, technique, mais aussi mental – et c’est pourquoi la défaite est noble parce qu’elle permet une remise en question. Une séance sans concentration, c’est une occasion gâchée et un signe de faiblesse. Le dojo est l’espace symbolique de ce travail à double effet. Il faut s’efforcer de laisser les scories du monde extérieur en dehors.

Le grade, c’est donc d’abord un symbole fort ? Je crois qu’il est important pour chacun de s’interroger sur le sens de son grade. Sur sa signification symbolique. Le grade n’est pas une série de diplômes où l’on va du premier au dixième échelon comme dans la mentalité occidentale. C’est une progression circulaire, en quelque sorte. Une sphère, un cercle, comme celui formé par la ceinture nouée, dans lequel on commence ceinture blanche et l’on finit ceinture blanche, parcours accompli.

Quelle est la signification de chacun des grades ?

J’engage chacun à approfondir son point de vue personnel sur les quelques pistes de réflexion proposées…

Le premier dan, celui de la ceinture noire, est celui où l’on met de la technique sur le naturel. En quelque sorte, on salit l’instinct premier, on le tue. Vous avez atteint un niveau, celui du noir, symbole d’une valeur technique, mais aussi de la perte de l’instinct qu’on retrouve plus tard.

Le second dan introduit la dualité. C’est l’apprentissage du double et du doute. L’autre en nous-mêmes nous tend un miroir qui nous permet de mieux nous connaître et de mieux nous affronter nous-mêmes. C’est le combat pour la maîtrise du corps.

Le troisième dan est un grade important car c’est celui qui symbolise l’union des trois principes : le corps, la technique et l’esprit au-dessus, qui domine. à cette étape, l’esprit maîtrise le corps et la technique, ce que formulent les Japonais par l’expression « Shin-Gi-Tai » « L’Esprit, la Technique et le Corps ensemble ».

Le quatrième dan symbolise la maîtrise de la matière. C’est un niveau où le pratiquant doit avoir acquis le contrôle de ses émotions « viscérales ». La peur frappe au ventre et empoisonne l’esprit. Par exemple, si on vous jette une pierre, il y a de fortes chances que vous la preniez, car la peur va paralyser votre réaction. Si c’est une balle molle, vous saurez en revanche facilement l’esquiver. Ces émotions qui s’expriment par des crispations, le « ventre noué », doivent être maîtrisées. à ce grade, ces émotions-là ne doivent plus troubler votre esprit, qui commande les gestes.

Le cinquième dan indique la maîtrise parfaite de son art. C’est le temps de l’ouverture et des échanges pour confronter et comparer. C’est à ce niveau que l’on recommande en karaté d’aller voir les autres écoles.

Le sixième dan est une étape essentielle car c’est l’accomplissement du parcours volontaire. Tout ce qui pouvait être fait a été accompli sur le plan du travail technique. On entre dans le véritable travail de l’esprit.

Au septième dan, on bascule vers autre chose. Le travail de la maîtrise a été fait. Le mental, plus lent à arriver à maturité, continue de grandir. Le pratiquant accompli ne se tourne pas vers son passé glorieux, mais contemple ce qu’il y a encore devant lui.

Le huitième dan est une lisière, celui qui sépare les deux mondes, celui du visible et de l’invisible qui, pour les Japonais, sont intimement liés. à ce grade, le maître se tient sur la ligne entrelacée des deux mondes.

Au neuvième dan, le cercle du visible commence à s’effacer. L’esprit du pratiquant est orienté vers le monde de l’invisible et laisse derrière lui les limites du matériel.

Au dixième dan, seul l’esprit reste. C’est un cercle, un point parfait, comme celui que les samouraïs dessinaient avant la bataille pour indiquer qu’ils étaient dégagés de leur vie et de ses contingences. Un dépouillement, un détachement complet, qui n’est plus troublé par rien. C’est le retour à l’origine, au point de départ, à la pureté, à la modestie du blanc, symbole de renaissance, de renouveau. La boucle est bouclée, le voyage est terminé.

Notre code moral, un héritage à faire vivre

Tous les samedis, au cours enfant et au cours adultes, nous demandons à Benoît de nous éclairer sur le code moral du Karate Do.  Cette explication prend une place très importante dans notre école, nous ne souhaitons pas former nos pratiquants sans les faire réfléchir sur la portée des préceptes que nous ont légué nos anciens.

Ainsi, nous espérons faire vivre le premier objectif de Funakoshi Senseï qui avait pour but de diffuser le Karaté pour “former des Hommes meilleurs”, c’est un projet compliqué, c’est un projet long qui n’a pas de fin,

mais c’est un projet que nous soutenons du mieux que nous pouvons au SKN.

 

LES NEUF VERTUS DU KARATEKA

Inspirées par les vertus du BUDOKA

1 – L’HONNEUR : MEIYO

C’est suivre un code moral et avoir un idéal de manière à se comporter dignement et respectueusement 

2 – LA FIDELITE : CHUJITSU

C’est le devoir et la nécessité incontournables de tenir ses promesses et de remplir ses engagements.

3 – LA SINCERITE : MAKOTO

C’est la qualité de celui qui ne déguise ni ses sentiments, ni ses pensées, de celui qui sait être authentique.

4 – LE COURAGE : YUKI

C’est la force d’âme qui fait braver le danger et la souffrance. La bravoure, l’ardeur et surtout la volonté sont les supports de ce courage.

5 – LA BONTE : SHINSETSU

C’est une des marques de courage. Elle dénote une haute humanité et nous pousse à être respectueux de la vie.

6 – L’HUMILITE : KYOKEN

C’est savoir être modeste, exempt d’orgueil et de vanité.

7 – LA DROITURE : TADASHI

C’est suivre la ligne du devoir et ne jamais s’en écarter. Elle nous permet de prendre sans aucune faiblesse une décision juste et raisonnable.

8 – LE RESPECT : SONCHOO

C’est savoir traiter les personnes et les choses avec déférence. C’est le premier devoir du Budoka.

9 – LE CONTRÔLE DE SOI : SEIGYO

C’est la qualité essentielle d’une ceinture noire car elle conditionne toute son efficacité.
Le code d’honneur et la morale traditionnelle enseignée par le Karaté-do sont basés sur l’acquisition de cette maîtrise.

 

A travers votre pratique du Karaté, faites en votre credo!

 

Pourquoi pratiquer le Karaté?

Les qualités physiques générales (vitalité, force, résistance, souplesse, détente) sont rapidement et nettement améliorées.

La conduite motrice (coordination, latéralité, équilibre, réflexes, contrôle et spontanéité, adaptation et sens tactique ) se développe durablement.

La prise de conscience et la gestion du temps (rythme, opportunité) et de l’espace (prise de conscience du corps, équilibre, précision, concentration, vigilance et détermination) deviennent une seconde nature.

Le Karate est un art martial riche et esthétique.

Il propose des approches diverses telles que  études et recherches techniques libres ou imposées, self-défense, pratique sportive et culturelle profondément enracinée.

Le Karate est un paradoxe passionnant, la tradition, la modernité, et le progressisme sont parfaitement fusionnés dans cette discipline martiale.

Il apporte des améliorations sur l’individu : courage, décision, concentration, confiance, goût de l’effort, constance dans l’effort, dépassement de soi, courtoisie et efficacité.

Quand à la discipline, le réalisme, l’esthétisme offrent au langage du corps et à l’esprit du karatéka, une diversité qui lui permet d’exprimer sa personnalité et de satisfaire toutes ses motivations (loisirs, recherche personnelle ou didactique, compétition.

Mais vous découvrirez vite que le Karate devient vite un besoin et surtout un plaisir.

Christian Lermusiaux, 5ème DAN KARATEDO